Yann Béliard (CREW, USN): « Du local au global : les espaces de la contestation dans la Grande-Bretagne du 19ème siècle »
Selon l’historienne Katrina Navickas, les mouvements de protestation en Grande-Bretagne entre 1789 et 1848 furent essentiellement « multi-scalaires », reposant sur des connections entre le local, le national et le global ; même quand les militants n’en avaient pas conscience, ils auraient produit un espace bien à eux, non seulement ancré dans un territoire singulier mais ouvert sur de vastes horizons.
Ma communication, testant cette hypothèse jusqu’en 1914, l’interrogera en trois temps. Elle examinera l’enracinement spatial des luttes, longtemps dénigré mais revalorisé par l’« histoire par en bas ». Elle tentera ensuite de démêler les parts de l’objectif et du subjectif dans la « montée en échelle » des contestations entre 1811 et 1914. Enfin, elle posera la question des pièges de cette structuration « multi-échelles » des rebellions, spectaculaire mais pas sans périls.
Maître de conférence en civilisation britannique à la Sorbonne Nouvelle, Yann Béliard est l’auteur d’une thèse sur les rapports de classe à Hull entre 1894 et 1910 (2007). Depuis, il a coordonné un numéro spécial de la Labour History Review consacré à la Grande Fièvre Ouvrière de 1910-1914 (2014), écrit pour le Dictionary of Labour Biography des notices consacrées à des militants de la période édouardienne (2018-2019) et co-édité deux ouvrages collectifs : Labour United and Divided from the 1830s to the Present (2018) ; Workers of the Empire, Unite. Radical and Popular Challenges to British Imperialism, 1910s-1960s (2021). Ses travaux en cours portent sur les métamorphoses de l’internationalisme ouvrier dans l’Angleterre impériale.
Stéphane Guy: Les socialistes britanniques et la nature : entre progrès et conservation
Le renouveau socialiste de la fin du dix-neuvième siècle se caractérise par des postures ambivalentes à l’égard du progrès technique. Si le principe de la propriété collective des moyens de production réunit la plupart des socialistes, l’industrialisation est conçue tantôt comme une condition préalable, tantôt comme un obstacle à sa réalisation. La nature représente à cet égard aussi bien une alternative au capitalisme, invitant à rompre avec l’idéologie mercantile, qu’un état primitif de concurrence à dépasser par la mise en commun des ressources. Au-delà de ces ambivalences, plusieurs figures socialistes partagent une vision de la société comme communauté visant moins à l’appropriation de la nature qu’à sa conservation, posture qui interroge leurs conceptions sous-jacentes du progrès et de la démocratie.
Stéphane Guy est professeur de civilisation britannique à l’université de Lorraine. Spécialiste d’histoire des idées, il a publié sur les intellectuels britanniques et la pensée politique des dix-neuf et vingtième siècles. Il est notamment l’auteur de la monographie Genèse du travaillisme britannique (Michel Houdiard, 2019) qui porte sur la philosophie de l’histoire des socialistes fabiens et a codirigé l’ouvrage Liberalism and Socialism since the Nineteenth Century (Palgrave Macmillan, 2024).